Cession d’activité d’un libéral

Cessation d’activité du professionnel de santé libéral

 

Il convient tout d’abord de préciser la définition de la cessation d’activité.

Au niveau fiscal, la cessation couvre l’arrêt de toute activité libérale, mais aussi le passage d’un exercice individuel à un exercice en société avec partage d’honoraires, ou tout autre changement de mode d’exercice. Toujours au niveau fiscal, la définition générale d’une cessation d’activité correspond à un changement de lieu, de clientèle et de nature d’activité. Ainsi, selon la jurisprudence, le passage d’une activité de praticien généraliste à une activité de spécialiste dans un autre département induit une cessation d’activité. En revanche, un simple changement d’adresse ou un départ en retraite tout en poursuivant un exercice libéral ne constituent pas une cessation d’activité. Enfin, un arrêt maladie de longue durée n’induit pas une cessation d’activité, sauf si le praticien décide d’arrêter son activité libérale. Cette activité perdure jusqu’à une décision d’invalidité définitive.

La cessation d’activité peut intervenir dans le cadre d’une date choisie ou d’une date qui s’impose au médecin. Un changement de mode d’exercice induit une date qui s’impose. Au niveau fiscal, la date de cessation d’activité a moins d’importance que par le passé. Désormais les questions sociales priment : la CET est due au 1er janvier, les cotisations sont dues par trimestre civil.

 

Les conséquences de la cessation d’activité

L’arrêt de toute activité libérale, ou un changement de mode d’exercice, implique de prévenir le Centre de Formalité des Entreprises (CFE), une entité appartenant à l’URSSAF. Cette formalité peut être réalisée via Internet. Il convient ensuite de prévenir le Service des Impôts des Entreprises trois mois avant, afin de l’informer de la date de cessation d’activité et, le cas échéant, du nom du successeur. Il reste enfin à prévenir son association agréée le plus tôt possible afin de recevoir un dossier consacré à la cessation d’activité contenant les conseils et les informations nécessaires.

Au niveau fiscal, une déclaration professionnelle n°2035 doit être établie dans les 60 jours suivant la cessation d’activité. Cette déclaration comprend les recettes encaissées et les créances, les dépenses réglées et les dettes, et permet de constater les plus ou moins-values sur l’ensemble de l’actif professionnel. Les créances et les dettes doivent être estimées. D’éventuelles corrections devront être portées sur une nouvelle déclaration qui se fera au plus tard au cours du mois de février de l’année suivante. Cette nouvelle déclaration annulera la précédente. Elle devra donc mentionner l’ensemble des éléments. S’il n’est pas possible de respecter le délai de 60 jours, il est toujours possible de téléphoner au service des impôts afin d’expliquer les causes du retard.

Le professionnel de santé concerné n’est pas tenu de rédiger une déclaration d’ensemble de ses revenus dans les 60 jours suivant la cessation d’activité. Certes, l’imposition pourra être demandée immédiatement, mais cette option permise par les textes est rarement mise en pratique. Elle impose néanmoins de disposer d’une trésorerie de sécurité. En revanche, l’imposition sera demandée immédiatement en cas de départ à l’étranger sans disposer de biens susceptibles d’être saisis sur le territoire national.

 

La cession du cabinet

La cession d’un cabinet peut intervenir dans le cadre d’un acte sous seing privé. L’intervention d’un notaire est obligatoire uniquement si l’acte porte sur un immeuble, mais non en cas de cession de parts d’une SCI. L’acte de cession doit obligatoirement être écrit. La négociation du prix entre les parties est libre. Les biens cédés devront par ailleurs être détaillés. Le cédant pourra ainsi calculer les plus-valus portant sur chaque élément. Pour sa part, l’acquéreur devra verser des droits d’enregistrement. Ces derniers sont de l’ordre de 3 %, après abattement de 23 000 euros sur le prix de cession.

 

Cession des éléments incorporels

Le premier élément incorporel correspond au droit de présentation à la clientèle. Il s’agit d’un engagement à présenter sa clientèle à son successeur durant une période fixée et à ne pas se réinstaller dans une zone géographique définie.

Les éléments incorporels couvrent également les parts de SCM. Dans ce cadre, l’estimation de la clientèle est difficile à établir. Elle dépend de la spécialité et de chaque cabinet. D’une manière générale, il existe de moins en moins de cession de clientèle. Cependant, certaines clientèles se vendent toujours extrêmement cher. Par le passé, la valeur de la clientèle était fixée selon le chiffre d’affaires. Par la suite, elle a été évaluée en fonction du bénéfice, puis de la rentabilité du capital investi. Désormais, les critères ont totalement évolué. Elle varie désormais essentiellement en fonction de la densité médicale.

L’estimation des parts de SCM interviendra généralement à la valeur résiduelle, c’est-à-dire en fonction du montant restant à amortir, même si certains éléments totalement amortis ont encore une valeur. Il est également possible de dissoudre une SCM lorsque seul l’un des membres de la société poursuit son activité. Le principal problème concernant les SCM provient des rapports entre associés. Ainsi, si l’un des associés part sans successeur, les charges seront réparties entre les associés qui restent, qui à terme, seront obligés de lui racheter ses parts. Il s’agit d’un problème que vous pouvez évoquer au préalable avec vos confrères demeurant au sein de la SCM.

Les éléments incorporels couvrent également les parts cliniques. Ces dernières font partie du patrimoine professionnel si elles sont inscrites dans le registre des immobilisations ou s’il est écrit que leur acquisition était la condition de l’exercice ; elles feront l’objet d’une plus-value professionnelle. Si aucune de ces conditions n’est remplie, les parts cliniques font partie du patrimoine privé et feront l’objet d’une plus-value privée.

Calcul des plus-value sur les éléments incorporels : il s’agit de la différence entre le prix de cession et le prix d’acquisition. Il s’agit généralement de plus-value à long terme, s’appliquant à des biens acquis depuis plus de deux ans. Elles sont taxées fiscalement à 16 %, auxquels s’ajoutent les prélèvements sociaux, soit une taxation globale de 28,1 %. Cette distinction entre plus-value de court ou long terme doit être mentionnée en page 3 de la déclaration 2035 en distinguant la situation de chaque élément.

 

Cession du matériel et du mobilier

L’estimation de la valeur du matériel et du mobilier se fonde généralement sur la valeur vénale. Il est conseillé de détailler la valeur de chaque élément sur une annexe à l’acte de cession. Par ailleurs, il est possible de céder le contrat de crédit bail, ou de lever l’option d’achat en cédant le bien.

La plus-value sur les éléments amortissables correspond à la différence entre le prix de cession (ou d’estimation) et la valeur résiduelle. Le prix de cession d’un matériel mis au rebus, ou donné à une association, sera nul. Dans le cas d’un don, il est préférable de disposer d’un document écrit prouvant cet élément.

La vente d’un véhicule inscrit au registre des immobilisations fera l’objet d’une plus value. De manière générale, un véhicule est amorti en cinq ans. La plus-value de ce véhicule correspondra donc à la différence entre le prix de vente et la valeur comptable du véhicule : la valeur comptable étant elle-même égale au prix d’achat diminué des amortissements pratiqués.

Les plus-value sur le matériel et le mobilier sont dans la plupart de cas des plus-valus à court terme.

 

Cession des locaux

Dans les communes de plus de 200 000 habitants, les locaux ayant fait l’objet d’une modification pour devenir des locaux professionnels ont fait l’objet d’une autorisation. Il convient également de spécifier le cas des cabinets implantés en Zone Franche Urbaine.

Dans le cas d’un cabinet situé dans des locaux loués, la transmission du cabinet implique la reprise du bail. En cas de location d’une SCI, se pose le problème des loyers excessifs.

Si le professionnel de santé est propriétaire du local, la vente engendrera une plus-value privée si le local n’est pas inscrit au registre des immobilisations. Si le bien figure au patrimoine professionnel, la cessation de l’activité engendrera obligatoirement une plus-value.

Si le bien relève du patrimoine privé, la plus-value du local détenu depuis plus de 15 ans est nulle.. S’il fait partie du patrimoine professionnel, au-delà de 15 ans, l’exonération porte uniquement sur la prise de la valeur du local entre la date d’acquisition et la date de cessation d’activité. En revanche, les amortissements qui auront été déduits seront réintégrés au titre de la plus-value à court terme.

C’est pourquoi, si le local figure dans le registre des immobilisations, un cumul entre emploi et retraite est envisageable. En effet, des exonérations de plus-values existent en cas de recettes inférieures à 90 000 euros dans les deux années précédant la cession. Par ailleurs, en cas de don à un enfant reprenant le cabinet, la plus-value est transférée sur cinq ans. Si cet enfant conserve les locaux durant cinq ans, il sera exonéré de plus-value, quel que soit le niveau de ses recettes.

Il peut également être judicieux de réintégrer le bien dans le capital privé du praticien trois ans avant le départ en retraite de ce dernier afin d’étaler la plus-value.

Dans le cas d’un bien figurant dans le patrimoine professionnel, puis réintégré dans le patrimoine privé, la question de la plus-value se pose uniquement en cas de cession du local. Il s’agira alors d’une plus-value privée constatée entre la date de réintégration dans le patrimoine privé et la date de cession. Si le local est réintégré dans le patrimoine privé avant d’être obligé de constater la plus-value, il ne faudra pas sous-évaluer le prix du local, dans la mesure où il s’agira du prix de référence pour la plus-value ultérieure si le local figure dans le patrimoine professionnel depuis plus de 15 ans.

Par ailleurs, il est indispensable d’indiquer au notaire qu’un local mis en vente figure dans le patrimoine professionnel. En effet, c’est le notaire qui récoltera les fonds destinés à payer la plus-value privée aux impôts. Or de nombreux adhérents n’ayant pas mentionné cet élément ont dû payer une plus-value privée, puis une plus-value professionnelle, parce qu’ils n’ont pas évoqué cet élément devant leur notaire.

Dans le cas d’un local mixte privé/professionnel, il est possible de demander un étalement de l’impôt en cas de réintégration dans le patrimoine privé au moment de la cessation d’activité. Cependant, cette option implique de payer des intérêts de retard.

 

Imposition des plus-values / déduction des moins-values

Il est possible de constater une moins-value, par exemple en cas d’impossibilité de revendre une clientèle qui avait été achetée. En règle générale, les moins-values à long terme s’imputent uniquement sur les plus-values à long terme. Cependant, en cas de cession d’activité, il est possible de déduire une partie de cette moins-value (montant de la moins-value x 16 / 33,33) sur le bénéfice. Dans les faits, le revenu peut ainsi être diminué de moitié.

Concernant les exonérations de plus-values, la plus-value à long terme sur le local bénéficie d’un abattement après 15 ans. Il existe trois autres possibilités d’exonération des plus-values. La plus intéressante est « l’exonération PME », qui s’applique aux praticiens dont les recettes sont inférieures à 126 000 euros. L’exonération porte sur l’ensemble des plus-values en cas de recettes inférieures à 90 000 euros ; elle est partielle et progressive entre 90 000 et 126 000 euros de recettes. Les recettes prises en compte correspondent à la moyenne enregistrée au cours des deux années antérieures.

Maintenir une activité après le départ en retraite peut constituer une solution intéressante pour bénéficier d’une exonération. Bien évidemment, il faut que cette option corresponde à un choix de vie. De plus, cette option est possible uniquement si l’activité se poursuit dans le local. Dans le cas contraire, le local n’est plus utilisé à titre professionnel, ce qui implique le calcul de la plus-value.

La deuxième possibilité d’exonération correspond à « l’exonération transmission ». Elle s’applique intégralement lorsque la valeur de l’ensemble des éléments de l’actif professionnel figurant au registre des immobilisations est inférieure à 300 000 euros, et partiellement lorsque cette valeur est comprise entre 300 000 et 500 000 euros. Cette exonération s’applique à l’ensemble des plus-values liées à la transmission du cabinet, à l’exception des biens immobiliers. C’est pourquoi il est préférable d’avoir recours à « l’exonération PME ». Bien évidemment, il est impossible de cumuler ces deux exonérations.

Enfin, le troisième régime d’exonération correspond à « l’exonération retraite », qui s’applique lorsque la retraite intervient dans les 24 mois suivant la cessation d’activité. Cette exonération peut être cumulée à « l’exonération transmission » ou à « l’exonération PME ». Les conditions sont identiques à celles de « l’exonération transmission » (cession de l’intégralité des éléments de l’actif). Cependant, cette « exonération retraite », qui est la plus appliquée par les praticiens, est la moins avantageuse, dans la mesure où elle exonère uniquement de l’impôt, mais pas des cotisations sociales. Il est donc préférable d’avoir recours à « l’exonération transmission ».

 

La détermination des créances et des dettes

Les créances correspondent aux recettes restant à percevoir. Pour leur part, les dettes correspondent aux dépenses restant dues. Il s’agit en premier lieu de la CET (Contribution Economique Territoriale), l’impôt qui remplace la taxe professionnelle. Il convient de rappeler que la suppression de la taxe professionnelle représente un cadeau fiscal pour votre profession. En effet, la CET couvre la CFE (cotisation foncière des entreprises), qui repose sur la valeur locative des locaux, et la CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises), qui n’est pas due en dessous de 500 000 euros de recettes et dont le taux d’imposition au-delà est limité. La taxe remplaçant la taxe professionnelle sera donc calculée uniquement sur la valeur locative de vos locaux. Il convient de préciser que la taxation prévue des recettes des professions libérales a été invalidée par le Conseil Constitutionnel. Aucune solution de remplacement n’a été trouvée et les pouvoirs publics ont indiqué que le gain au titre de cet exercice sera acquis pour les professions libérales. Les adhérents de l’AGAPS ont la possibilité d’estimer le montant dû au titre de la CET en consultant le site Internet de l’association. Il est également possible de se rendre sur le site Internet « impots.gouv.fr ». Ce calcul implique de connaître le montant de la valeur locative de vos impôts, qui figure sur votre dernier avis d’imposition de taxe professionnelle.